Au Mali, le rôle d’une unité d’élite antiterroriste en question dans les violences meurtrières. Les manifestations contre le pouvoir ont fait onze morts et des dizaines de blessés depuis vendredi. Le déploiement de la Forsat à Bamako est mis en cause.
Une unité d’élite antiterroriste a-t-elle été employée pour réprimer la contestation civile contre le pouvoir malien ? La question est soulevée et le cabinet du premier ministre l’a posée au ministre de la sécurité après trois jours de violences meurtrières.
Il est beaucoup question de la Force spéciale antiterroriste (Forsat) depuis vendredi et le début de troubles qui ont fait onze morts et des dizaines de blessés, le plus important mouvement de contestation contre le pouvoir depuis le putsch de 2012.
Les leaders du mouvement ont accusé les autorités d’usage excessif de la force. Les représentants des organisations africaines, de l’ONU et de l’Union européenne (UE) au Mali ont condamné « l’usage de la force létale dans le cadre du maintien de l’ordre », claire référence aux tirs à balles réelles. De nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer la présence sur le terrain de membres de la Forsat.
Les journalistes de l’AFP ont vu à plusieurs reprises des hommes encagoulés vêtus de noir, arme automatique à la main à l’arrière de pick-up dans les rues de Bamako, sans qu’il soit possible de déterminer leur unité.
« Faire toute la lumière »
Dans un courrier adressé au ministre de la sécurité Salif Traoré dont relève la Forsat, le directeur de cabinet du premier ministre Boubou Cissé dit avoir été alerté quant à l’emploi de la Forsat dans « des opérations de maintien de l’ordre (…) pour appuyer les unités des forces de sécurité déployées ». Dans ce courrier daté de mardi et frappé d’un tampon « urgent », il demande au ministre de la sécurité de dire qui a décidé d’engager la Forsat et pourquoi.
Dans un communiqué reçu mardi soir par l’AFP, le premier ministre « regrette sincèrement les pertes en vies humaines » et indique qu’« une enquête est en cours pour faire toute la lumière et situer les responsabilités ».
La Forsat a été créée en 2016 à la suite d’attentats meurtriers en 2015 dans la capitale Bamako, comme une force d’élite et de réaction rapide à toute forme de « terrorisme ». Elle est composée de 60 policiers, 60 gendarmes et 60 membres de la garde nationale, selon l’arrêté ministériel de sa création. Elle est exclusivement dédiée à la lutte antiterroriste précise l’arrêté. Elle est régulièrement formée par les partenaires internationaux du Mali, notamment la mission de formation de l’Union européenne, l’EUTM Mali, ou le RAID, l’unité d’élite de la police française.
L’affectation de la Forsat à une mission de maintien de l’ordre « serait une violation claire de l’arrêté qui structure cette force, chargée exclusivement de lutter contre le terrorisme, et non de lever des barricades érigées par des manifestants », a dit à l’AFP Ousmane Diallo, chercheur à Amnesty International. Selon lui, « la chaîne de responsabilité dans ces errements doit être établie et des sanctions mises en œuvre pour éviter leur répétition dans le futur ». (Source Le Monde Afrique)
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