Vendredi 28 juin à Alger, la 19 ème manifestation contre le régime a vu le dispositif policier renforcé, pour contenir les manifestants dans les rues de la ville pour dénoncer le régime en place.
En effet un dispositif policier particulièrement important a été déployé vendredi au cœur d’Alger, plusieurs heures avant la manifestation hebdomadaire contre le régime, au lendemain d’une nouvelle fin de non-recevoir de l’armée aux revendications des manifestants.
De très nombreux policiers en uniforme et en civil sont restés visibles et une centaine de fourgons de police étaient garés dans le centre d’Alger, ainsi que des canons à eau et des bulldozers anti-barricades.
La police a également procédé à de nombreux contrôles d’identité, sans motif valable, et une dizaine de personnes ont été arrêtées et embarquées dans des fourgons, selon un journaliste.
C’est un demi-millier de personnes qui étaient dans la rue, une heure avant le départ du cortège, et sur les réseaux sociaux des journalistes algériens ont fait état d’actions de la police pour empêcher des petits groupes de s’agglomérer.
À Alger, il y a eu des fouilles de jeunes, de passants, porteurs de sacs à dos. Des policiers en civils déployés partout, a écrit sur Twitter Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des Droits de l’Homme (LADDH).
Ahmed, manifestant de 54 ans, s’est dit impressionné par le nombre de policiers et déclare : « Je n’ai jamais vu ça. Ils veulent nous faire peur, mais ils ont tort, la peur est (désormais) derrière nous », a-t-il assuré.
Depuis plusieurs semaines, la police procède chaque vendredi matin, avant que la foule ne soit trop nombreuse, à des arrestations à Alger, sans motif apparent. Mais vendredi dernier, elle a particulièrement ciblé les personnes en possession de drapeaux berbères, après des consignes du chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah, devenu l’homme fort du pays depuis que le mouvement de contestation a poussé le président Abdelaziz Bouteflika à la démission le 2 avril.
Déjà à Alger, 18 manifestants avaient été arrêtés le vendredi 21 juin alors qu’ils étaient en possession de drapeaux berbères. Ils ont été inculpés et placés en détention provisoire. Le motif en était » atteinte à l’unité nationale », infraction passible de 10 ans d’emprisonnement.
Plusieurs autres personnes, dont deux étudiants ont été arrêtés mardi à Alger, et inculpés des mêmes chefs d’accusation. Ils ont été placés sous contrôle judiciaire. D’après Mr Salhi, ce vendredi, ce n’était pas le drapeau amazigh (berbère) qui était recherché, mais c’est le » hirak » (mouvement) que les policiers voulaient étouffer, mais les algériens sont restés pacifiques et mobilisés.
Durant la semaine, le général Gaïd Salah, qui fut durant 15 ans un pilier de la présidence Bouteflika (1999-2019), a appelé les Algériens à « comprendre » les décisions de l’armée, alors que les manifestants réclament chaque semaine que le chef d’état-major « dégage » et exige un « État civil ».
Le commandement de l’armée rejette invariablement les revendications des manifestants : l’instauration d’instances de transition, débarrassées de tous les anciens fidèles d’Abdelaziz Bouteflika et chargées de réformer le pays avant la tenue d’une présidentielle.
Jeudi, le général Gaïd Salah a accusé les partisans d’une telle transition de vouloir protéger les anciens responsables politiques et hommes d’affaires liés à Bouteflika, visés par les nombreuses enquêtes pour corruption récemment ouvertes par la justice, encouragée par l’armée.
Plusieurs d’entre eux ont été écroués, dont deux anciens Premiers ministres, Ahmed Ouyahia, trois fois chef du gouvernement de M. Bouteflika entre 2003 et 2019, et Abdelmalek Sellal (2012-2017).
Des figures de la contestation et des observateurs s’inquiètent d’une possible instrumentalisation de la justice au profit de luttes de clan au sommet et réclament que ce soit le futur pouvoir élu qui mène à bien les enquêtes sur la présidence Bouteflika.
» Ceux qui veulent instaurer des phases de transition, veulent protéger la corruption en reportant la lutte lancée contre elle », a accusé le général Gaïd Salah lors d’un deuxième discours en deux jours. Il a réitéré n’avoir aucune ambition politique, mais réaffirmé implicitement que l’armée resterait aux commandes tant qu’un nouveau président ne serait pas élu.
L’annulation de la présidentielle du 4 juillet place le pouvoir intérimaire dans une situation délicate, la Constitution prévoyant que le président par intérim Abdelkader Bensalah rende le pouvoir à un président élu d’ici le 9 juillet, un délai trop court pour organiser un nouveau scrutin. (Source Ouest France) Nous suivrons donc l’évolution de la situation. Paola