Au moins 35 civils ont été tués mardi en Syrie dans des raids aériens du régime contre une enclave rebelle près de la capitale, le pouvoir de Damas faisant fi des pressions internationales au moment où il est accusé d’avoir perpétré des attaques chimiques. Au plan humanitaire, l’ONU réclame une « cessation immédiate des hostilités » pour au moins un mois dans toute la Syrie afin de permettre de venir en aide aux populations assiégées. L’armée de l’air syrienne a visé mardi le bastion rebelle de la Ghouta orientale, a rapporté l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), selon qui trois enfants figurent parmi les victimes des frappes qui ont fait plus de 160 blessés.
« Le bilan des victimes de mardi pourrait être revu à la hausse en raison de la présence de personnes coincées sous les décombres et de blessés dans un état critique », a indiqué le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane. Dans la localité de Saqba, un correspondant de l’AFP a pu voir les secouristes des Casques blancs sortant des décombres une petite fille au visage ensanglanté. Puis c’est au tour d’une vieille femme.
Et à Kafr Batna, un marché situé près d’une école a été entièrement détruit. Dans la morgue d’un hôpital, une femme vient identifier son mari, et s’effondre en larmes en voyant son corps. Assiégée depuis 2013 par les forces du régime, la Ghouta orientale est la cible quasi-quotidienne de bombardements, et ses quelque 400 000 habitants vivent une grave crise humanitaire, avec des pénuries de nourriture et de médicaments. Ces dernières semaines, le régime a intensifié ses frappes contre la Ghouta orientale, mais aussi contre la province d’Idleb, autre bastion de la rébellion dans le nord-ouest syrien. Lundi, 31 civils ont ainsi trouvé la mort dans des bombardements du régime sur la Ghouta, tandis que 16 personnes ont péri la veille à Idleb, selon l’OSDH. Ces deux régions font pourtant partie des quatre zones de désescalade mises en place en Syrie pour obtenir une trêve dans les combats, alors que la guerre qui ravage le pays depuis 2011 a fait plus de 340 000 morts.
Des violences « qui tournent en dérision ces soit-disant zones de désescalade », a dénoncé mardi une commission de l’ONU chargée d’enquêter sur les crimes de guerre commis en Syrie. « Ces dernières 48 heures, l’ampleur et la férocité des attaques ont considérablement augmenté », déplore-t-elle. La commission a par ailleurs annoncé qu’elle enquêtait sur des attaques chimiques présumées du régime à Saraqeb, une localité de la province d’Idleb, où 11 cas de suffocation ont été rapportés, mais aussi dans la Ghouta orientale. Le 22 janvier, l’OSDH avait ainsi rapporté 21 cas de suffocation dans la Ghouta, tandis que des habitants et des sources médicales avaient évoqué une attaque au chlore. Le régime nie recourir à des armes chimiques.
Des « preuves évidentes »
Lundi, lors d’une réunion du Conseil de sécurité, Washington a essayé de faire adopter un projet de déclaration condamnant le recours aux armes chimiques en Syrie. Mais Moscou a voulu amender le texte, notamment pour ne pas mentionner la Ghouta, sans pouvoir recueillir l’accord de Washington. Il y a des « preuves évidentes » pour confirmer le recours à du chlore dans ces attaques menées dans la Ghouta orientale, avait souligné Nikki Haley, ambassadrice américaine aux Nations unies. Son homologue russe Vassily Nebenzia a dénoncé une « campagne de propagande » visant à « accuser le gouvernement syrien » d’attaques dont « les auteurs ne sont pas identifiés ».
« Crise humanitaire aggravée »
Déclenché en 2011 par la répression gouvernementale de manifestations pacifiques, le conflit en Syrie s’est complexifié avec l’implication de pays étrangers et de groupes jihadistes, sur un territoire de plus en plus morcelé.
Déplorant « une situation extrême », les représentants des différentes agences de l’ONU basées à Damas ont réclamé mardi « une cessation immédiate des hostilités pour au moins un mois, dans toute la Syrie », selon un communiqué. L’objectif est de « permettre la distribution d’aide humanitaire, l’évacuation des blessés et des malades dans un état critique, et alléger la souffrance » des civils, souligne le communiqué.
« L’équipe humanitaire des Nations unies en Syrie met en garde contre les conséquences désastreuses d’une aggravation de la crise humanitaire dans plusieurs régions du pays », souligne le communiqué. (Source Ouest France)