Emmanuel Macron a effectué ce mercredi son premier déplacement en Algérie avant de s’envoler, dans la soirée, pour le Qatar. Donc quelques heures à Alger et puis s’en va… Pour son premier déplacement en Algérie depuis son élection, Emmanuel Macron a opté pour une visite éclair. «Une visite d’amitié et de travail», précise l’Elysée, et non une visite d’Etat, avec son lot de grands discours et de symboles, «qui pourra avoir lieu ultérieurement», déminent, par avance, les conseillers présidentiels. Mais même bref, ce voyage n’en est pas moins jalonné de pièges.
Comme tous ses prédécesseurs, le président français est avant tout attendu sur ce passé franco-algérien qui ne passe pas. «Le peuple attend toujours une reconnaissance de ses souffrances de la part de ses colonisateurs d’hier», déclarait, en juillet dernier, les autorités algériennes. Emmanuel Macron n’échappera pas à la question : est-il prêt, comme président, à assumer que «la colonisation fut un crime contre l’humanité», comme il l’avait dit à Alger en février, alors qu’il était candidat, et à présenter les excuses de la France ? Propos qui avaient mis le feu aux poudres et l’avaient contraint à demander «pardon» à ceux qu’il avait pu blesser, mais sans pour autant se dédire.
Construire une nouvelle relation
«Il est jeune, ça aide pour dire les choses, souligne l’historien Benjamin Stora, qui fait partie du voyage. Il est né après la guerre d’Algérie. Il n’a pas de lien personnel avec le Maghreb. C’est un atout pour avancer et ne pas être prisonnier de la mémoire.» «Il faut tourner la page pour construire une nouvelle relation avec l’Algérie», plaident ses conseillers diplomatiques.
Pour l’Elysée, le discours de Macron à la jeunesse africaine, prononcé à Ouagadougou, au Burkina Faso, il y a quelques jours, fait foi. Ni déni ni repentance, pas besoin d’aller au-delà. Pourtant, ce dernier est plutôt mal passé. «L’Algérie n’est pas le Burkina», pouvait-on lire sur les réseaux sociaux après sa prise de parole en Afrique, les internautes algériens pariant sur l’échec de cette visite dans leur pays.
La sécurité aux frontières
Dans ce contexte, comment «réconcilier les mémoires», selon l’expression consacrée à l’Elysée ? Sans redire les mots qui fâchent de part et d’autre de la Méditerranée. Le président devrait faire un geste en direction d’Alger en acceptant de restituer des crânes de résistants algériens aujourd’hui au musée de l’Homme de Paris. Figure imposée, il déposera aussi une gerbe devant le Monument des martyrs. Mais pas sûr que cela suffise… Sa déambulation dans les rues d’Alger à la rencontre des jeunes Algérois à la mi-journée fera, à cet égard, figure de test.
L’autre aspect sensible de ce voyage concerne les questions de sécurité. De par ses frontières avec le Mali, le Niger et la Libye, Alger est devenu un interlocuteur clé dans le Sahel mais se refuse à intervenir en dehors de ses frontières. La France aimerait que le pays coopère davantage, alors que certains terroristes sévissant dans cette zone sont d’origine algérienne. Officiellement, «la relation franco-algérienne est très bonne», mais, entre l’opacité du pouvoir et les ressentiments du passé, Macron est obligé à la prudence. (Source Le Parisien)