Mali – Une affaire de sûreté de l’état


Boubou Cissé, dernier Premier ministre du Président Keïta, avait formellement démenti le 23 décembre toute implication dans un projet de déstabilisation des institutions de la transition censée ramener les civils au pouvoir en 18 mois.
Je vais terminer cette journée par une information du journal « Le Point Afrique »
Le parquet de Bamako a ouvert une information judiciaire contre Boubou Cissé, l’ancien Premier ministre d’IBK, et six autres personnes.
Où est passé Boubou Cissé, le dernier Premier ministre de l’ex-président déchu Ibrahim Boubacar Keïta ? Alors que la justice malienne a inculpé jeudi 31 décembre six personnalités civiles pour tentative présumée de coup d’Etat, selon leurs avocats, son nom a été officiellement cité dans le communiqué du procureur de la République de Bamako. Quatre mois et demi après le dernier putsch en date dans le pays en guerre, difficile de démêler les fils de cette nouvelle affaire qui secoue jusqu’au plus haut sommet de l’état.

Ce que l’on sait
Tout a commencé le lundi 21 décembre avec une série d’interpellations menées par la Direction générale des services de l’Etat (DGSE, le renseignement malien). Une semaine plus tard alors que les arrestations se poursuivaient, le procureur de Bamako a enfin apporté des réponses dans cette affaire particulière au regard de la personnalité des mis en cause et d’un contexte où on peut s’étonner d’une telle possibilité alors que les militaires, très forts dans cette transition, sont au coeur du pouvoir et donc du Renseignement. « Suite à une dénonciation des services de sécurité faisant état de faits d’atteinte à la sûreté de l’Etat, une enquête préliminaire a été ouverte au niveau du Service d’investigations judiciaires (SIJ) de la gendarmerie nationale », avait fait savoir le procureur de Bamako, Mamoudou Kassogué.

Jeudi 31 décembre, le parquet de Bamako a confirmé dans un communiqué l’ouverture d’une information judiciaire contre six personnalités, dont le dernier Premier ministre avant le putsch d’août, Boubou Cissé, pour « complot contre le gouvernement, association de malfaiteurs, offense à la personne du chef de l’Etat et complicité ». Le juge a ordonné leur placement sous mandat de dépôt. Boubou Cissé avait formellement démenti le 23 décembre toute implication dans un projet de déstabilisation. « Je tiens à prendre l’opinion nationale et internationale comme témoins de cette odieuse tentative de jeter le discrédit sur ma personne et l’idéal politique que je suis supposé incarner : je ne suis ni directement ni indirectement, de quelque manière que ce soit, associé à un projet de déstabilisation des institutions de mon pays, et je défie quiconque d’en apporter la preuve contraire », a-t-il écrit sur sa page Facebook. Le 24 décembre, des hommes armés non identifiés ont fouillé son domicile à Bamako en son absence, selon ses avocats. Depuis l’ancien Premier ministre, qui n’a pas été incarcéré, est « resté introuvable » selon le parquet. Aux dernières nouvelles, il est présumé se trouver toujours à Bamako.
Le parquet évoque des faits présumés « d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat », des « indices graves et concordants » de l’existence d’une « entreprise criminelle » et des « actions de sabotage » contre des initiatives prises par les autorités de transition mises en place par les militaires après leur putsch. Le parquet se garde de parler de coup d’Etat, mais c’est bien « pour des faits (présumés) de tentative de coup d’Etat » que les mis en cause ont été inculpés, a souligné dans un communiqué le collectif d’avocats qui les défend.

Quelles sont les personnalités citées ?

En dehors de Boubou Cissé, la justice a écroué Mohamed Youssouf Bathily, dit « Ras Bath », militant, polémiste et animateur radio aux nombreux sympathisants ; Vital Robert Diop, directeur général du Pari mutuel urbain (PMU), organisation de paris sur les courses de chevaux et de jeux de hasard ; Aguibou Tall, responsable d’une agence œuvrant à l’accès aux télécommunications, demi-frère de Boubou Cissé ; et deux hauts cadres du Trésor public (Finances de l’Etat), Mamadou Koné et Souleymane Kansaye.
Autre personnage dans le collimateur : Sékou Traoré, secrétaire général de la présidence de la République. Interpellé lui aussi, il avait été relâché, mais n’est pas tiré d’affaire. Compte tenu de son statut de magistrat et d’un rang équivalant à celui de ministre, les éléments le concernant ont été transmis au procureur général près la Cour suprême, dit le parquet.

Ce que la justice leur reproche

Aucun détail précis n’a été divulgué sur les faits reprochés. Le parquet invoque en termes vagues « des contacts suspects » entre certains mis en cause, des déplacements également suspects dans le pays ou la possibilité de liens avec des « organisations et personnalités influentes du monde médiatique (…) pour les besoins de l’entreprise criminelle projetée ».
Cette affaire survient dans une période de profonde incertitude dans un pays plongé depuis des années dans la crise sécuritaire et politique, et confronté à la propagation djihadiste, parmi d’autres défis majeurs. Après le quatrième coup d’Etat depuis l’indépendance en août, les militaires ont mis en place des organes de transition qu’ils contrôlent étroitement mais qui sont censés céder le pas à des civils élus au bout de 18 mois. L’accueil initialement favorable fait aux putschistes après des mois d’exaspération et de contestation fait progressivement place au désenchantement devant la militarisation ressentie de la transition et la lenteur des résultats.
(Source : Le Point Afrique (avec AFP)-Publié le 01/01/2021 à 19:11)

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