Afin d’éviter des sanctions régionales, les militaires qui ont renversé l’ex-président Ibrahim Boubacar Keita ont fait nommer un officier passé à la vie civile.
Avec des militaires qui ont fait de la rareté de leurs prises de parole une stratégie, chaque indice mérite d’être pris en compte. Ainsi, lorsque le matin du lundi 21 septembre, le capitaine D. explique depuis le perron du quartier général du camp Soundiata-Keïta de Kati, épicentre du pouvoir malien depuis le coup d’Etat du 18 août, que son chef, le colonel Assimi Goïta, doit parler sous peu sur les antennes de la Radio-Télévision nationale, il semble urgent d’aller prêter l’oreille à cette déclaration inattendue.
Comme il l’avait fait un mois plus tôt, en devançant dans l’action d’autres équipes de soldats qui projetaient de renverser le président Ibrahim Boubacar Keïta (« IBK »), le quintet de colonels à la tête du Conseil national du salut du peuple (CNSP) a pris tout le monde de court en dévoilant l’identité de celui qui présidera la transition au Mali.
Les observateurs du pays espéraient que soit mis en place par la junte, lundi 21 septembre, un collège chargé de désigner les futurs président et vice-président ; puis, le lendemain, date hautement symbolique du 60e anniversaire de l’indépendance, l’annonce des noms des personnalités chargées de conduire le pays à de nouvelles élections dans dix-huit mois. Dimanche, un diplomate de haut rang s’inquiétait même des intentions réelles des militaires. « Ils prennent trop de temps. Il y a anguille sous roche », estimait-il alors que la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) avait exigé une remise du pouvoir à des civils au plus tard le 22, sous peine sinon de durcir les sanctions contre le Mali, celles-ci pouvant aller jusqu’à une mise sous embargo total de ce pays enclavé et largement dépendant des appuis extérieurs.
Béret vert vissé sur le crâne, treillis ajusté, le colonel Assimi Goïta, le chef de la junte, se disant conscient du « contexte global » dans lequel se trouve son pays, a en moins de trois minutes d’intervention débloqué en partie la situation. « A l’issue des assises de ce 21 septembre 2020, le collège a désigné les personnes ci-après pour assurer la mise en œuvre de la feuille de route de la transition. Président de la transition au Mali : M. Ba N’Daw [également orthographié Ba N’Dao ou Ba N’Daou]. Vice-président de la transition : colonel Assimi Goïta. La cérémonie de prestation de serment aura lieu le vendredi 25 septembre », a déclaré le président du CNSP.
(Source : Le Monde Afrique – Par Cyril Bensimon – Publié hier à 11h17, mis à jour à 12h32)